LEE Bae 이배
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Comment avez-vous conçu cette exposition à la Fondation Maeght ?
Il ne s’agit pas d’une rétrospective même si les oeuvres sont datées de 1990 à aujourd’hui. Au
travers des sculptures, des installations, des peintures et des dessins présentés j’ai simplement
voulu montrer mon cheminement, l’évolution de mon travail. J’ai joué aussi bien avec les salles à
l’intérieur de la Fondation qu’avec l’espace extérieur. J’ai ainsi installé dans la cour des grandes
pièces de charbon de bois, attachées avec des élastiques, que j’ai disposées comme s’il s’agissait
d’un alignement de menhirs à Carnac. J’ai fait venir mes fagots de Cheongdo, où je suis né, près
de Daegu en Corée du sud. Leur carbonisation a été réalisée en montagne dans un ancien four
en forme d’igloo, construit en argile. Ils ont été brûlés pendant quinze jours à une température
d’environ mille degrés, comme une cuisson de céramique, puis refroidis pendant quinze jours
également. Soit un mois au total. Je les ai faits en Corée, je les apporte ici comme une rencontre
entre les pins de Saint-Paul et les pins coréens. J’aime cette idée du déplacement, du voyage qui
correspond à ma façon de penser et à mon mode de vie depuis maintenant presque trente ans
avec mes allers et retours réguliers entre la France et mon pays d’origine.
Quelle approche avez-vous eu de la Fondation ?
Je la connais depuis longtemps. Là, je suis venu à plusieurs reprises, avec un oeil forcément
différent pour préparer cette exposition, et chaque fois la Fondation Maeght me fait penser à
un monastère. De la même manière que devant les temples coréens il y a toujours une grande
statue pour combattre le diable, il y a ici dans le jardin les sculptures de Miró, qui sont des signes,
des icônes. Comme si le gardien de la Fondation était Miró. Ce lieu consacré à la création, à
l’art, à sa présentation est aussi pour moi un endroit de recueillement. J’avais vu un jour une
sculpture de Giacometti à côté du MoMa. Les gens vivaient autour, ils travaillaient dans le
quartier, ils circulaient à toute vitesse autour d’elle, pressés, stressés. J’avais ressenti une forme
d’agressivité, soulignée par la touche, la façon dont la matière est travaillée au couteau. Lorsque
j’ai vu pour la première fois la sculpture de la Fondation Maeght, j’ai eu la sensation inverse,
celle d’un apaisement, d’une grande spiritualité, d’une grande présence comme celle d’un moine
dans un monastère. Il y avait là un recueillement, comme lors d’une prière, et beaucoup plus de
simplicité et de sensibilité qu’à New York. Le dialogue était totalement différent et c’est bien le
lieu qui insufflait cette impression et qui modifiait ma perception.
En quoi son architecture vous fait-elle penser à un monastère ?
La forme des toits, avec les bords courbes, me rappelle celle des temples avec leur toiture qui
remonte et semble se redresser vers le ciel. La comparaison m’a toujours frappé. La circulation
“La Fondation Maeght me fait penser
à un monastère”
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de la lumière aussi me fait penser à celle d’un monastère. José Luis Sert, l’architecte de la
fondation a beaucoup travaillé en fonction de la lumière, on sent qu’il a voulu faire entrer cette
lumière du sud de la France à l’intérieur des salles. Et la lumière est également très importante
dans mon travail puisque le charbon de bois réagit beaucoup avec elle : il l’absorbe dans un
premier temps pour la renvoyer ensuite. Enfin, il y a le cadre, l’environnement, très similaire. De
la même manière que la fondation est entourée de pins, il y a presque toujours une forêt de pins
devant un temple. En plus c’est un bois très parfumé, sous lequel pousse, en Corée comme en
France, un champignon, le « champignon de pin », qui a un goût exquis.
Vous évoquez le charbon de bois qui occupe une place prépondérante dans votre travail.
Qu’est-ce qui, au départ, vous a conduit à choisir ce matériau ?
Lorsque je suis arrivé à Paris, en février 1990, j’ai trouvé un atelier à Pantin dans une ancienne
usine de la Seita. Pour peindre, je suis allé acheter du matériel dans des magasins spécialisés et là
j’ai été très surpris par les prix. J’avais peu de moyens financiers et pour moi c’était horriblement
cher, notamment les couleurs. J’ai beaucoup hésité et près de mon atelier il y avait un entrepôt
de bricolage et de matériaux de construction où j’ai trouvé des sacs de charbon de bois pour les
barbecues... Je ne sais pas pourquoi, j’ai acheté un de ces sacs. Et je me suis alors souvenu que
lorsque j’étais étudiant aux Beaux-Arts à Séoul, j’avais commencé avec des fusains et que c’était
la même matière. Je me suis aussi tout de suite rendu compte qu’avec un sac je pouvais travailler
une semaine, ce qui était économique. J’en étais très content parce que cela me permettait de
ne pas me limiter, de ne pas me freiner à cause du coût des matériaux. Dans un premier temps,
j’ai utilisé ce charbon de bois comme du fusain. Et puis, petit à petit, en avançant dans mon
travail, j’ai acheté un médium acrylique semi-transparent pour la fixation, ce même medium
que j’utilise d’ailleurs aujourd’hui dans mes tableaux. Je trempais le charbon dedans et quand je
dessinais ça se collait tout seul. Je frottais beaucoup et la poudre de charbon chargeait la toile,
ce qui donnait des reliefs de matière intéressants.
Par la suite vous êtes resté très lié au charbon de bois, et même encore aujourd’hui pour vos
sculptures et installations. Comment expliquez-vous cet attachement ?
En commençant à travailler avec le charbon de bois, j’ai tout de suite eu conscience qu’il était
très lié à ma propre culture et à ce moment-là j’avais besoin de garder un lien fort avec mes
origines, comme tout artiste inconnu débarquant dans une ville qu’il ne connait pas et dont il
ne parle pas la langue, qui plus est en venant d’Extrême-Orient. Je me sentais étranger, très loin
de chez moi, et le charbon de bois me permettait de retrouver l’univers de l’encre de Chine, de
la calligraphie, l’ambiance de la construction des maisons que j’avais connue enfant. Dans la
tradition coréenne en effet, lorsqu’on creuse des fondations, le charbon de bois est la première
chose qu’on dispose, notamment pour protéger contre l’humidité, les insectes, etc. De même
lorsqu’un enfant naît, on le signale à la porte en accrochant du charbon de bois à une corde. Il est
également au centre de cette cérémonie de feu « La maison de la lune brûlée », qui à l’occasion
de la première pleine lune de janvier, voit les villageois construire un monticule, comme une
maison de 20 à 25m de hauteur, avec des troncs de pins. Les membres de chaque famille y
accrochent leurs voeux écrits sur des bouts de papier de Chine, puis on met le feu à l’ensemble.
Donc ce charbon de bois, symboliquement fort, m’était familier. Il me permettait de garder
le lien avec mon passé. Il s’agissait donc à la fois d’un rapport économique, conjoncturel et
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culturel. Par la suite, c’est ce dernier aspect, culturel, qui m’a conduit à continuer à travailler avec
lui, alors que j’aurais pu utiliser du plâtre ou du métal. Mais j’ai eu envie de poursuivre avec ce
matériau qui encore aujourd’hui m’importe beaucoup et me permet de conjuguer mes origines
au monde occidental, de montrer que ce qui pouvait paraître comme singulier est universel et
que la symbolique du charbon est lisible partout dans le monde. Avec, bien évidemment, ses
formidables qualités et possibilités plastiques, esthétiques.
Qu’est-ce qui vous a conduit, en 2000, à réaliser des installations avec le charbon de bois.
Que vous apportent-elles par rapport aux tableaux ?
J’ai commencé à réaliser des installations parce que je voulais aller encore plus loin dans cette
volonté de mettre en avant le matériau, de donner encore plus la sensation de sa réalité, de sa
«physicalité». Je n’ai jamais fait une installation juste pour faire une installation, mais pour libérer
le matériau du cadre refermé et parfois contraignant du tableau, pour mieux jouer avec l’espace,
pour créer une rencontre et une confrontation physiques encore plus fortes avec le spectateur.
Par exemple, lorsque je dispose au milieu d’un grand espace des fagots de morceaux de charbon
attachés avec un élastique, c’est pour que les visiteurs se promènent au milieu de cette matière.
En Corée, un grand moine a dit un jour : « l’eau est eau » ou encore «la montagne est montagne».
Pour moi, c’était pareil: le charbon est là, tout simplement, il est charbon. Dans sa nature même.
En plus, en l’apportant dans un espace et en l’attachant, je souligne mon intervention, je le
transpose. Sans le transformer, juste en le mettant dans un cadre différent, je crée un lien, un
dialogue entre un matériau naturel et un lieu culturel.
En 2001, vous avez commencé à travailler très différemment en utilisant des liants, des
mediums acryliques. Qu’est ce qui a procédé à ce changement ?
J’ai travaillé le charbon de bois jusqu’à mon exposition au Musée d’art contemporain de Séoul.
Je l’ai préparée pendant un an et après avoir fini, j’ai vraiment ressenti le besoin de changer et de
laisser le charbon de bois à la nature. J’ai eu l’impression que dans mes tableaux je l’enfermais, je
le bloquais et j’ai eu envie de lui rendre, évidemment de façon symbolique, sa liberté. Il me restait
beaucoup de poudre de charbon et un jour j’ai tout jeté en l’air, comme si je faisais un happening,
une performance. J’ai d’ailleurs fait beaucoup de photos de ce moment-là. Ce geste m’a fait
l’effet d’une libération. Je me suis aperçu que le matériau en lui-même, sa présence physique
ne m’étaient plus nécessaires, tout du moins pour mes tableaux, et que j’avais dorénavant
uniquement besoin de son image. À mon retour à Paris, en mars 2001, j’ai décidé de commencer
un nouveau travail. Comme je n’arrivais pas à trouver d’autres couleurs, ni à abandonner le noir,
je l’ai gardé en utilisant cette fois du carbone (certes à base de charbon de bois) mais en le
confrontant à la résine et au médium acrylique. Je fais donc se rencontrer dans l’espace deux
matériaux, deux images, deux symboles, avec d’un côté la nature et de l’autre des produits
industriels. Je suis obligé de bien les manipuler parce que j’ai envie de donner l’impression, non
pas qu’ils sont posés comme ça en surface, mais qu’ils viennent et remontent vraiment de la
toile. Un peu à la manière dont une image monte et se révèle sur un papier photographique. À
partir de ce moment-là, j’ai compris que je n’avais plus besoin du relief comme auparavant et au
contraire que j’avais envie que la surface soit la plus lisse possible, que le regard entre vraiment
dans la toile pour la découvrir. C’est la raison pour laquelle depuis ce changement important
dans mon travail, il n’y a pas de traces de pinceau, pas de geste. Tout semble extrêmement plat.
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Ce n’est que dans un second temps qu’on s’aperçoit que la couleur crème, cette couleur de
cire, de cierge, qui entoure le noir, donne une grande profondeur et permet au noir de garder sa
propre masse et sa grande densité.
Auparavant le fond de vos toiles avait justement la couleur de la cire. Depuis quelque temps,
ces fonds sont devenus très blancs. Quelle est l’origine de cette évolution ?
J’ai eu envie de renforcer, de faire ressortir la forme noire, d’accentuer sa densité pour
qu’elle donne l’impression d’être encore plus suspendue dans l’espace. Pour cela, il me fallait
augmenter les contrastes et donc passer de la couleur crème de la cire à un blanc plus marqué.
En même temps, et ce n’est pas paradoxal, je voulais donner plus de légèreté, plus de fluidité à mes
formes noires, ce que permet ce blanc, alors que la couleur crème a tendance à plus encadrer, enserrer.
Le contraste entre la forme et le fond est dorénavant plus fort. Leur rencontre, leur frontière créent
une vibration nouvelle et le reflet du noir sur le blanc donne encore plus de profondeur au noir.
Car c’est bien cela qui m’importe dans cette idée de contraste : donner le plus possible de
densité au noir, donner un corps au noir puisque mon sujet reste le noir.
Comment naissent ces formes noires ?
Quand j’arrive à l’atelier le matin, je n’ai aucune idée de ce que je vais dessiner, je n’ai pas de
sujet précis en tête et mon but, à ce moment-là, n’est d’ailleurs même pas de chercher une
image. Mon travail est d’abord une attitude et c’est cette attitude qui va générer des formes.
Je commence donc calmement avec un pinceau et de l’encre de Chine et je dessine sur
des feuilles de papier. Je ne sais pas quelle forme va sortir de moi, de ma tête, de mon
corps et chaque jour le résultat est évidemment différent, en fonction des divers éléments
intérieurs comme extérieurs, aussi bien mon humeur que le temps qu’il fait dehors.
Le processus de travail relève de la mémoire, un peu comme si j’écrivais des carnets.
Tous les matins je fais ainsi une vingtaine, une trentaine de dessins. Ensuite je les regarde et
je choisis celui qui me plaît. Je ne fais jamais d’images figuratives puisque mes formes sont
avant tout le reflet de mon esprit, de ma sensibilité, de mon corps, de la façon dont tout cela
fonctionne ensemble. Ma démarche n’est donc pas théorique, elle est plutôt la conséquence de
ma propre culture, de mon éducation, de mon enfance, de mon expérience, de ce qui se passe
aujourd’hui, de ma vie en somme. Cette forme peut venir de la nature, des objets avec lesquels
je vis, de la ville, du corps, de mes images mentales... en fait de tout ce qui m’entoure sans
qu’on puisse pour autant identifier précisément quoi que ce soit. Je tiens à ce que les formes
que je peins soient les plus naturelles et spontanées possibles. Je laisse ouvert, je ne veux pas
m’engager dans une figure particulière qui pourrait devenir restrictive. C’est pourquoi je préfère
des formes abstraites, sans aucun aspect narratif, anecdotique, pour donner directement une
sensation. Lorsque je trouve la forme juste, c’est vraiment par elle que je peux donner un corps
au noir, inscrire et faire vivre ce corps noir dans l’espace blanc du tableau. Il est très important
que la surface de ce corps noir, soit extrêmement lisse parce qu’elle prend ainsi l’aspect d’une
peau, aussi bien la peau de la peinture que la peau humaine. C’est ce qui me permet d’en faire
avant tout une zone d’énergie, de pureté et de spiritualité. Voilà pourquoi, et je le répète, la
forme vient avant tout d’une attitude.
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Pourquoi répétez-vous de nombreuses fois sur papier la forme choisie, avant de la peindre
sur la toile ?
Parce que je veux que chaque forme soit justement le fruit d’un travail de la mémoire de ma
main avec le pinceau, l’encre, le papier. Et pour arriver à cela, il faut passer par de nombreuses
répétitions de la même forme. Je dis souvent que cette manière de travailler est assez proche de
celle des pianistes, qui jouent d’abord avec leurs doigts. Cela ne veut pas dire qu’ils ne jouent pas
avec leur tête, mais c’est un mélange des deux et c’est souvent la main qui commence, la main
qui a très bien mémorisé la partition. De la même manière, souvent je fais une trace de pinceau
et je me rends compte que c’est ma main qui connaît par coeur cette forme à force de l’avoir
répétée. Comme si ma main était en avance sur ma tête.
Quels rapports entretenez-vous avec la calligraphie ?
Aucun. Il n’y a jamais eu de liens entre mon travail et la calligraphie. Quand j’étais étudiant, j’ai un
peu commencé à écrire avec le pinceau avec ses poils très longs et très souple, mais cela n’a pas
duré longtemps. La calligraphie est pour moi ingérable, c’est une pratique extrêmement difficile,
qui conjugue à la fois la concentration intellectuelle et la maîtrise physique, l’énergie spirituelle et
la gestuelle du corps. Il faut sans cesse s’entraîner pour parvenir à avoir la bonne technique, c’est
long et complexe. Je n’ai jamais cherché à travailler et à m’exprimer dans cette voie-là.
Vous êtes toujours resté fidèle au noir et au blanc...
Oui parce qu’ils n’ont pas d’identifications comme d’autres couleurs, ils ne sont pas narratifs,
ils ne réfèrent à rien d’autre qu’à eux-mêmes. En Orient, les grands calligraphes peignent
le bambou avec de l’encre de Chine et personne ne leur demande pourquoi ils peignent en
noir des tiges vertes. Dans notre culture, s’ils les peignaient en vert, cela n’évoquerait pas
un vrai bambou, alors que le noir donne beaucoup plus l’image, l’idée de la plante. Car bien
plus que la représentation, ce qui compte avant tout c’est donner l’idée du bambou. J’ai
un peu la même approche et si j’utilise le noir et le blanc, c’est dans ce sens et pas du tout
dans une démarche minimaliste (même si par ailleurs, j’apprécie beaucoup l’art minimal).
En même temps le noir est plein de couleurs, il absorbe toutes les couleurs. Quand je réalisais
mes tableaux avec du charbon de bois, je le brûlais, je le grattais, je le ponçais pour lui donner des
brillances, des reflets, des effets de moire, pour justement en faire sortir des aspects chromatiques.
Par ailleurs, le charbon de bois vient du feu. Normalement, il ne meurt jamais et il est donc
toujours potentiellement lui aussi générateur d’énergie. Le charbon de bois reste d’ailleurs le
dernier quand tous les autres matériaux sont morts, sont brûlés. Il demeure essentiel. Quand tout
a disparu, il reste la pureté de sa matière. Cet aspect m’a toujours fait penser au suprématisme,
à Malevitch. Quand je regarde un de ses tableaux, je suis face à une image de pureté, de
cristallisation. La culture asiatique aime maîtriser l’esprit et accorde une grande importance à
la spiritualité. Elle laisse aussi une place à l’intuition. De la même manière, j’essaye toujours de
conjuguer ces aspects, le mental et le sensible, la clairvoyance et l’intuition. Et le noir permet
tout cela.
Propos recueillis par
Henri-François Debailleux
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How did you conceive this exhibition at the Fondation Maeght ?
It is not a retrospective, even if the pieces date from 1990 to the present. What I wanted to
show with the sculptures, installations, paintings and drawings here is simply the route I have
taken, the evolution of my work. I use both the rooms inside the Foundation and the space
outside. In the courtyard, for example, I’ve installed big pieces of charcoal, held together with
elastic bands, which I have set out like the standing stones at Carnac. I had the bundles sent
from Cheongdo, where I was born, near Daegu, in South Korea. They were carbonised in
the mountains, in an old kiln shaped like an igloo, built in clay. They were burned for fifteen
days at a temperature of about a thousand degrees, like firing ceramic, then cooled, also for
fifteen days. A month in total. I had them made in Korea, I brought them here as an encounter
between the pines of Saint-Paul and Korean pines. I like this idea of displacement, of travel,
which corresponds to my way of thinking and what has been my way of life for going on thirty
years, what with my regular journeys back and forth between France and my country of origin.
How did you approach the Foundation?
I have known the place for a many years. This time, I made several visits to prepare the
exhibition, so obviously it wasn’t the same, and on each one the Foundation reminded me
of a monastery. In the same way as there is always a big statue to fight the devil outside a
Korean temple, so there are the Miró sculptures in the garden here, which are signs, icons, as
if Miró was the guardian of the Foundation. For me this place devoted to creation, to art, and
to displaying it, is also a place of meditation. One day I saw a Giacometti sculpture outside
MoMA. People did their living around it, they worked in the neighbourhood, they drove around
it at full speed, hurried and stressed. I felt a kind of aggression, which was underlined by the
touch, the way the material was worked with the knife. When I first saw the sculpture at the
Fondation Maeght, I had the opposite sensation, a feeling of pacification, of great spirituality,
of intense presence like a monk in a monastery. There was this meditative quality, as in prayer,
and much more simplicity and sensibility than in New York. The dialogue was totally different
and it was definitely the place that instilled that impression and changed my perceptions.
In what way does its architecture remind you of a monastery?
The form of the roofs, with the curved edges, reminds me of temples and the way their roofs
rise up and seem to be rising up towards the sky. It’s a comparison that has always struck
me. The circulation of the light also reminds me of the light in a monastery. José Luis Sert,
the architect of the Fondation, put a lot of work into this. You can sense that he wanted to
bring this Southern French light right into the rooms. And light is also very important in my
“the Foundation reminded me of
a monastery”
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own work, because the charcoal reacts to it: first it absorbs it, then it sends it back. Finally,
there is the setting, the environment, which is very similar. In the same way as the Fondation is
surrounded by pines, there is nearly always a pinewood in front of a temple. What’s more, it’s
a very fragrant wood under which there grows – both in Korea and France – a mushroom, the
“pine mushroom,” which has an exquisite taste.
You mention charcoal, which features very prominently in your work. What was it that
originally made you choose this material?
When I came to Paris, in February 1990, I found a studio in Pantin in an old Seita cigarette
factory. I went to buy equipment for my painting in the specialist stores and the prices really
surprised me. I didn’t have much money and for me it was horribly expensive, especially the
colours. I couldn’t make up my mind. Anyway, near my studio there was a DIY and building
materials warehouse where I found these sacks of charcoal for barbecues. I don’t know why,
but I bought one of these sacks, and I remembered that when I was a student at the Fine Arts
in Seoul, I started out with charcoal, and that it was the same material. I immediately realised,
too, that with one sack I had enough to work with for a week, which was economical. I was
very happy about that because it meant I didn’t have to limit myself, to stint myself because of
the cost of the materials. To begin with, I used it like charcoal crayon. And then, little by little,
as my work progressed, I bought a semi-transparent medium as a fixative, in fact the same
medium as I use in my paintings today. I dipped the charcoal in it and when I drew it stuck
all on its own. I rubbed hard and the charcoal powder covered the canvas, which produced
interesting textured reliefs.
After that, charcoal continued to be very important to you, and it still is even today for your
sculptures and installations. How do you explain this attachment?
When I started working with charcoal, I saw at once that it was closely bound up with my
own culture. What’s more, at the time I felt the need to keep a strong connection with my
roots, like any unknown artist arriving in a city that he doesn’t know and whose language he
doesn’t speak – especially one coming from the Far East. I felt like a stranger, very far from
home, and for me the charcoal was a way back to the world of Indian ink, of calligraphy, the
atmosphere of housebuilding that I had known as a child. In the Korean tradition, when you dig
the foundations, charcoal is the first thing you put in, notably for protection against humidity,
insects, etc. Likewise, when a child is born, you announce the fact by hanging charcoal from
the door on a rope. It is also at the centre of that fire ceremony, “Burning the moon house,”
when, on the occasion of the first full moon, in January, villagers build a mound like a house,
20 to 25 metres high, with pine trunks. The members of each family hang up their wishes
there, written on bits of Chinese paper, then they set light to the whole thing. So I was familiar
with charcoal and its symbolic strength. It enabled me to keep the connection with my past.
It was, then, an economic, contextual and cultural relation. Afterwards, it was the last aspect,
the cultural one, that made me go on working with it, when I could have used plaster or metal.
But I wanted to continue with this material which is still very important to me today and allows
me to link my origins to the Western world, to show that what might appear to be singular is
universal, and that the symbolism of charcoal is legible all around the world. With, of course,
its tremendous qualities and plastic, aesthetic possibilities.
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What led you to make installations with charcoal in 2000? What did they bring you compared
to the paintings?
I started making installations because I wanted to go further in this effort to put the material
to the fore, to give an even greater sensation of its reality, of its “physicality.” I have never
made an installation just for the sake of making an installation, but to liberate the material from
the closed and sometimes constricting framework of the painting, the better to play with the
space, to create an even stronger physical encounter and confrontation with the viewer. For
example, when I set out bundles of bits of charcoal held together by elastic bands in a large
space, it is so that visitors can walk around in the middle of this material. In Korea, a great
monk once said: “Water is water,” and “The mountain is the mountain.” For me, it was the same:
the charcoal is there, quite simply: it is charcoal. The natural entity. Furthermore, by bringing
it into a space and by tying it together, I am drawing attention to my own intervention, I am
transposing it. Without transforming it, just by putting it in a different setting, I am creating a
link, a dialogue between a natural material and a cultural place.
In 2001 you started working very differently, using binders, acrylic mediums. What brought
this change about?
I worked with charcoal up until my exhibition at the contemporary art museum in Seoul. I
spent a year preparing for that and when I had finished, I really felt the need to change and
to leave charcoal to nature. I had the impression that I was cramping it in my paintings, that
I was blocking it, and I wanted to give it back its freedom – symbolically speaking, of course.
I still had a lot of charcoal powder and one I day I threw it all up into the air, as if I was doing
a happening, a performance. I also took lots of photos of that moment. That gesture had a
liberating effect on me. I realised that the material itself, its physical presence, was no longer
necessary to me, at least for my paintings, and that all I needed now was its image. When
I got back to Paris, in March 2001, I decided to start on a new set of works. As I couldn’t
find other colours, or give up black, I kept it, using it this time in the form of carbon (based,
it is true, on wood charcoal), but putting it with resin and acrylic medium. I am therefore
bringing together in space two materials, two images, two symbols, with nature on one side
and industrial products on the other. I have to manipulate them because I want to give the
impression, not that they are just placed on the surface, but that they are coming and actually
rising up from the canvas. A bit like the way an image rises up and is revealed on photographic
paper. As of that moment, I understood that I no longer needed the relief as before, and that
on the contrary I wanted the surface to be as smooth as possible, so that the gaze really would
enter the canvas and discover it. That’s why there have been no brushstrokes, no gestures in
my work since this big change. Everything seems extremely flat. Only later do you see that the
cream colour – that wax, candle colour around the black – gives great depth and enables the
black to keep its own bulk, and its great density.
Before, the grounds of your canvases were indeed wax-coloured. For some time now, these
grounds have been very white. Where did this development come from?
I wanted to consolidate, to make the black form stand out, to accentuate its density so that it
looks as if it is hanging in space. For that, I had to increase the contrasts and therefore go from
the cream colour of the wax to a more pronounced white.
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At the same time – and this is not a contradiction – I wanted to give my black forms more
lightness, more fluidity, and the white allows this, whereas the cream colour tends to surround,
to enclose more. The contrast between form and ground is now stronger. Their encounter,
their frontier, creates a new vibration and the reflection of the black in the white gives the
black even more depth.
Because of course, that is what matters to me in this idea of contrast: giving the black maximum
density, giving the black body, because black is still my subject.
How do the black forms come into being?
When I get into the studio in the morning, I have no idea what I’m going to draw. I have no
precise subject in mind and in fact my aim, at that particular moment, is not even to find an
image. My work is an attitude first of all and it is this attitude that will generate forms.
I therefore start off quietly with a brush and Indian ink and I draw on sheets of paper. I don’t
know what form is going to come out of me, out of my head, of my body, and every day the
result is clearly different, in keeping with the different internal and external elements, both my
mood and the weather outside. The working process is based on memory, rather as if I was
writing notebooks.
Every morning I do about twenty, maybe thirty drawings. Then I look at them and I choose
the ones I like. I never make figurative images because my forms are above all the reflection
of my mind, of my sensibility, of my body, of the way all this works together. My approach is
therefore not theoretical, it is more the consequence of my own culture, of my education, of
my childhood, of my experience, of what is going on today – in a word, of my life. This form
can come from nature, from the objects I live with, from my body, from my mental images – in
fact, from everything around me, even if you can’t exactly define anything. I want the forms I
paint to be as natural and as spontaneous as possible. I leave things open, I don’t want to get
into a specific figure that could prove restrictive. That’s why I prefer abstract forms, with no
narrative aspect, no anecdote, so as to go directly to sensation. When I find the right form, it
is really through this that I can give black a body, inscribe this black body and make it live in
the white space of the painting. It is very important that the surface of this black body should
be extremely smooth because in that way it takes on the look of a skin, the skin of painting as
well as human skin. That’s what enables me to make it into what is essentially a zone of energy,
purity and spirituality. That is why, to repeat myself, the form comes above all from an attitude.
Why do you repeat the chosen form on paper so many times before painting it on the
canvas?
Because I want each form to result from the work of memory by my hand with the brush, the
ink, the paper. And to achieve that, the form has to be repeated many times. I often say that
this way of working is fairly close to that of pianists, who play first of all with their fingers. That
doesn't mean they don’t play with their head, but that it’s a mixture of the two and it’s often
the hand that starts, the hand that has fully memorised the score. In the same way, I often
make a line with the brush and I realise that it’s the hand that knows this form by heart from
having repeated it. As if my hand was in advance of my head.
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What is your relation to calligraphy?
None. There were never any connections between my work and calligraphy. When I was a
student, I did do a bit of writing using a brush with very long, very soft hairs, but that didn’t last
long. For me calligraphy is something I can’t manage, it’s an extremely difficult practice, which
combines both intellectual concentration and physical control, spiritual energy and bodily
gesture. You have to keep training in order to have the right technique, it’s long and complex.
I have never tried to work and express myself in that way.
You have always stuck with black and white.
Yes, because they are not identifiable like other colours; they are not narrative, they do not
refer to anything other than themselves. In the East, the great calligraphers paint bamboo with
Indian ink and nobody asks them why they paint these green stems black. In our culture, if they
painted them green that wouldn’t evoke a real bamboo, whereas black gives the image, the
idea of the plant much better. Because what is much more important than the representation,
what counts, is conveying the idea of the bamboo. My approach is rather similar and if I use
black and white, it is in this spirit, and not with some kind of minimalist intention (even if, it so
happens, I do greatly appreciate minimal art).
At the same time, black is full of colours, it absorbs all the colours. When I was making my
pictures with charcoal, I would burn it, scrape it, polish it to make it shiny, reflective, to create
a moiré effect, precisely in order to bring out its chromatic aspects.
Also, charcoal comes from fire. Normally it never dies and therefore it too is always a potential
generator of energy. Charcoal is in fact the last material remaining when all the others are
dead, are burned. It remains essential. When everything else has gone, the purity of its matter
remains. This aspect has always reminded me of Suprematism, of Malevich. When I look at
one of his paintings, I see an image of purity, of crystallisation. Asian culture loves to master
the mind and sets great importance by spirituality. It also leaves room for intuition. In the
same way, I always try to combine different aspects: the mental and the sensorial, lucidity and
intuition. You can do all that with black.
Interview by
Henri-François Debailleux